L'heure est sombre, je
vais pouvoir vous transmettre une nouvelle vision.
Shayu laissait le vent
marin fouetter son visage et prit une grande inspiration comme si ce
devait être la dernière.
Il n'avait pourtant rien à craindre, le chalutier était solide, suffisamment en tout cas pour ne pas céder aux assauts des vagues. La peinture orange écaillée donnait des dents au navire qui tranchait les flots avec férocité, faisant fuir les squales restants. « Un prédateur plus gros que les prédateurs » fanfaronnaient le capitaine Chanzui. Un élan buccal qui sonnait toujours comme un coup d'envoi pour la vraie chasse, à tenté qu'il y en ait une fausse, une illégale peut-être ?
Car en plus de thon, dorades et de leurs gigantesques derrières, l'équipage ramenait des petits bouts de requins. Des ailerons. Soigneusement découpé sur les requins-marteaux qui se laissaient prendre dans les mailles.
Enfin, ça, c'était en théorie, car pour l'instant, les petits blancs à la face en moule à gaufre se faisaient rares. « Et les clients aussi » pestaient contre le capitaine. Il faut dire qu'Hongkong refusait maintenant de servir de la soupe aux ailerons dans les réceptions officielles. Et avec ça, la pêche devait être « étroitement contrôlé » par les ONG locales. Shayu broyait du noir, la cueillette d'ailerons alourdissait convenablement le paquet de feuilles vertes à la fin du mois, il faudrait bientôt en donner aux gardes côtiers pour être tranquille.
« On en tien un ! » S'exclama le capitaine Chanzui.
Les mailles s'agitaient, un requin-marteau d'une taille peu commune se débattait avec la force du dernier espoir. Espoir qui fut convenablement éteint lorsqu'on le projeta sur le pont.
Shayu saisit son couteau et s'approcha de la bête qui battait le sol avec fureur. Les yeux du pêcheur glissèrent sur le corps de l'animal, ce n'était vraiment pas un squale normal. Sa robe cendre laissait paraître un âge canonique, de multiples cicatrices semblait dessiner des lettres issues d'un alphabet tribal, mais surtout son œil crevé luisait d'une lueur vengeresse.
« Bon, tu te bouges Shayu ». L'exclamation du capitaine sortit le rêveur amateur de sa torpeur. Il saisit l'aileron et commença à le scier. La graisse et le sang maculèrent son habit, mais le bout de chaire finit par céder. Shayu se tourna vers la mâchoire pour en extraire quelques dents, c'est que ça pouvait valoir six cents pièces sur internet. Mais l'animal rendu fou par l'éviction de sa nageoire découragea le pêcheur par de grands claquements. Amputé, mais toujours vivant, il fut rejeté dans les eaux sombres se tortillant de douleur et d'égarement, incapable de nager correctement
« Bah, c'est qu'un petit bout de peau, il peut s'en sortir » émit Shayu pour lui-même et il détourna le regard de l'eau, il avait surtout hâte d'être en congé.
Il n'avait pourtant rien à craindre, le chalutier était solide, suffisamment en tout cas pour ne pas céder aux assauts des vagues. La peinture orange écaillée donnait des dents au navire qui tranchait les flots avec férocité, faisant fuir les squales restants. « Un prédateur plus gros que les prédateurs » fanfaronnaient le capitaine Chanzui. Un élan buccal qui sonnait toujours comme un coup d'envoi pour la vraie chasse, à tenté qu'il y en ait une fausse, une illégale peut-être ?
Car en plus de thon, dorades et de leurs gigantesques derrières, l'équipage ramenait des petits bouts de requins. Des ailerons. Soigneusement découpé sur les requins-marteaux qui se laissaient prendre dans les mailles.
Enfin, ça, c'était en théorie, car pour l'instant, les petits blancs à la face en moule à gaufre se faisaient rares. « Et les clients aussi » pestaient contre le capitaine. Il faut dire qu'Hongkong refusait maintenant de servir de la soupe aux ailerons dans les réceptions officielles. Et avec ça, la pêche devait être « étroitement contrôlé » par les ONG locales. Shayu broyait du noir, la cueillette d'ailerons alourdissait convenablement le paquet de feuilles vertes à la fin du mois, il faudrait bientôt en donner aux gardes côtiers pour être tranquille.
« On en tien un ! » S'exclama le capitaine Chanzui.
Les mailles s'agitaient, un requin-marteau d'une taille peu commune se débattait avec la force du dernier espoir. Espoir qui fut convenablement éteint lorsqu'on le projeta sur le pont.
Shayu saisit son couteau et s'approcha de la bête qui battait le sol avec fureur. Les yeux du pêcheur glissèrent sur le corps de l'animal, ce n'était vraiment pas un squale normal. Sa robe cendre laissait paraître un âge canonique, de multiples cicatrices semblait dessiner des lettres issues d'un alphabet tribal, mais surtout son œil crevé luisait d'une lueur vengeresse.
« Bon, tu te bouges Shayu ». L'exclamation du capitaine sortit le rêveur amateur de sa torpeur. Il saisit l'aileron et commença à le scier. La graisse et le sang maculèrent son habit, mais le bout de chaire finit par céder. Shayu se tourna vers la mâchoire pour en extraire quelques dents, c'est que ça pouvait valoir six cents pièces sur internet. Mais l'animal rendu fou par l'éviction de sa nageoire découragea le pêcheur par de grands claquements. Amputé, mais toujours vivant, il fut rejeté dans les eaux sombres se tortillant de douleur et d'égarement, incapable de nager correctement
« Bah, c'est qu'un petit bout de peau, il peut s'en sortir » émit Shayu pour lui-même et il détourna le regard de l'eau, il avait surtout hâte d'être en congé.
C'est le couteau dans la poche et le vague à l'âme qu'il retrouva
le chalutier après ses congés.
Avant d'être accueilli par ses collègues, il fut arrêté par une étrange momie. Un homme (enfin, il le supposait), terré dans un fauteuil roulant, couvert de bandages, sanglotant à chaque souffle.
« N'y vas pas... N'y vas pas... Il te... Il te... » , articula la créature au prix d'atroces efforts.
Shayu était certes très ému, et surtout très dégoûté par le triste spectacle, mais il n'eut ni temps ni pièce à accorder à la pauvre bête. Il salua poliment la momie et embarqua.
De retour parmi ses collègues, il serra les poignets de mains habituelles remarquant tout juste que le capitaine n'était pas là.
Avant d'être accueilli par ses collègues, il fut arrêté par une étrange momie. Un homme (enfin, il le supposait), terré dans un fauteuil roulant, couvert de bandages, sanglotant à chaque souffle.
« N'y vas pas... N'y vas pas... Il te... Il te... » , articula la créature au prix d'atroces efforts.
Shayu était certes très ému, et surtout très dégoûté par le triste spectacle, mais il n'eut ni temps ni pièce à accorder à la pauvre bête. Il salua poliment la momie et embarqua.
De retour parmi ses collègues, il serra les poignets de mains habituelles remarquant tout juste que le capitaine n'était pas là.
Shayu laissait le vent marin fouetter son visage et prit une grande inspiration comme si ce devait être la dernière. La brise était toutefois plus brisante que d'habitude. Les vagues ne lacéraient plus seulement la coque, mais venaient s'écraser sur le pont manquant d'engloutir les marins. Dans de telles conditions, le nouveau capitaine n'eut d'autre choix que d'ordonner le retour au port, pestant allégrement contre ces conditions climatiques qui changeait beaucoup trop vite. Accroché au bastingage Shayu était tout aussi circonspect, il n'avait jamais vu de tempête se lever si vite.
Perdu par cette pensée, il fut frappé par une vague agressive.
Dans les eaux sombres, Shayu s'agita, engourdit pas ses vêtements. La bouche fermée, les yeux ouverts, il essaya de retrouver le sens de la surface. Une ombre grisâtre lui tourna autour. Malgré l'eau salée qui flouait sa vision, Shayu reconnu le requin à l'œil crevé. Il battit ses membres de toutes ses forces pour regagner la surface.
Ses oreilles n'étaient plus bouchées, c'est dans sa tête qu'il entendit la voix.
« Pourquoi paniquer ? Mes frères et moi n'allons pas te tuer, humain, nous reprendrons seulement ces petits bouts de peau que tu nous as arrachés, mais ne t'inquiètes pas, tu devrais t'en sortir ».
Shayu laissait le vent marin fouetter son visage et prit une grande inspiration comme si ce devait être la dernière.
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